Repères

Le Gd Chahut

Il arrive des jours où tout semble se combiner.

Un ORCHESTRE entier s'éparpille pour jouer, pendant toute une journée, dans toute l'école d'architecture de Grenoble.
Comme s'ils faisaient un peu le même métier que nous à Cresson, mais avec des instruments de musique plutôt que des sonomètres & de la sociologie : écouter, tester, étudier l'espace sonore. Les espaces, les lieux, les coins & recoins, avec toute leurs variétés & conjugaisons, où le son prend sa forme, & grâce à celà, chercher, générer, créer en dialogue des musiques qui y correspondent.

On n'écoute plus pareil, ce n'est plus seulement de la musique, ou bien c'en est une nouvelle dimension, où les déplacements de l'auditeur feraient partie de la partition...

À la ré-écoute de l'enregistrement, on ne sait plus non plus quels sons émanent de ces instrumentistes explorateurs & expérimentateurs, & lesquels appartiennent à la vie quotidienne de ce bâtiment (les pas, les portes, les voix, les gens, les escaliers, les matériaux, les oiseaux, l'annonce au micro, les gouttes...) bref, les espaces architecturés, leurs acoustiques & leur peuplement circonstancié.

À cette époque je testais la réactivité de mon système d'enregistrement audio "Tetart Expérience", & l'occasion grandeur réelle m'est tombé sur la gueule : j'ai donc passé la journée à les poursuivre & enregistrer ce que j'en pouvais. Il ne s'agit pas bien sûr ni seulement d'acoustique, ni seulement d'architecture, ni seulement de musique...
J'appelle ça la dimension "circonstancielle" de l'expérience... D'autres parlent d'ambiance...

Il y a bien sûr une dimension de piratage dans ces enregistrements, puisque je n'ai ni demandé l'autorisation d'enregistrer ni celle de publier ici. De toutes façon, c'est une oeuvre collective, depuis les archis & les artisants qui ont construit ce bâtiment, les musiciens qui y jouent ce jour-là & tous les autres qu'on y entend & reconnait au détour d'un couloir...?
(grâce leur soit rendue).

Je pense parfois à ces "pauvres" musiciens : souvent ils doivent jouer dans des espaces très normés, des salles de concert ou de studio où un ingénieur viendra leur règler l'acoustique pour que le public, bien cadré lui aussi & à peu près immobile, puisse écouter au mieux leur prestation... Ici ce qui leur a été offert, c'est une toute autre liberté...

Une spéciale dédicace cependant à Thibaud Noll. Il était étudiant à cette époque, & président de l'association Cutch qui a invité ce Grand Collectif de la Drôme voisine.